

Au fait, je m'en vais là :

« la non-signifiance est une catégorie frustrante qui rend les gens fous. Tout le monde cherche des raisons. Mais parfois il n'y en a pas». Mais l'ouvrage pose de nombreuses questions, ouvre des pistes sur les raisons qui nous poussent à avoir des enfants, sur leur éducation, sur le jugement - souvent hâtif - de la société. À ce sujet, l'auteure s'exprime de façon très juste : « On essaie encore de s'expliquer les raisons du tueur alors qu'une femme qui n'aime pas son enfant subit l'opprobre général. Elle est jugée d'avance alors que le meurtrier, lui, aura droit à un procès».Eva ne nous cache aucune de ses émotions, de la plus pure à la plus malsaine (comme suspecter son fils de méchanceté pure) jusqu'au massacre final. On pourrait s'attendre à lire le récit d'un enfant maltraité par sa mère, mais il n'en est rien, Eva tentant de faire son possible pour "réussir" l'éducation de son enfant et lui donner l'amour dont il a besoin, même si Kevin développe un rapport haineux avec sa mère. Un vrai petit monstre.
«les femmes sont fatiguées que la maternité soit dépeinte comme une suite de moments nourrissants et merveilleux. C'est difficile et frustrant d'élever des enfants. La pression sur la relation amoureuse est énorme et ne rapproche pas nécessairement les conjoints. Mais on ne lit ces choses là nulle part.»C'est ce qui explique aussi pour elle le succès que le livre a remporté auprès des groupes féministes, même si Lionel Shriver «ne veut pas être poussée dans une position politique». Elle rajoute :
« Je ne suis pas une experte en maternité. Je suis une écrivaine de fiction. Les gens oublient volontiers que j'ai inventé cette histoire. Je suis persuasive et c'est une histoire convaincante. Ce que les gens font de mon roman ne m'appartient pas».Suite à l'écriture de ce roman, l'auteur a su qu'elle n'aurait jamais d'enfants. Elle précise que la maternité «n'est pas pour [elle] et qu'[elle] a probablement pris la bonne décision» (mais on ne peut jamais être sûr).
L’Amélie-mélo
Amélie Nothomb est là, et bien là : on est heureux de vous annoncer que Ni d’Eve ni d’Adam (Albin Michel) signe son retour (au Japon) gagnant.
Entre 1985 et 1990, de retour en Tunisie, il poursuit son travail de composition et, par de nombreux concerts, acquiert une notoriété publique. En 1987, il se voit confier la direction de l'Ensemble musical de la ville de Tunis et, en 1988, il ouvre le Festival de Carthage avec Leilatou tayer. Tunis Hebdo écrira : « Si nous devions élire le musicien des années 80, nous choisirions sans hésiter Anouar Brahem ». En 1990, il s'envole pour une tournée aux États-Unis et au Canada et, en 1992, il est appelé à concevoir et à participer activement à la création du Centre des musiques arabes et méditerranéennes au Palais Ennajma Ezzahra du baron d'Erlanger à Sidi Bou Saïd.
Outre ses propres albums, il écrit aussi des musiques de films et fait partie, avec le libanais Rabih Abou-Khalil, de ce courant de la musique contemporaine qui réunit musique arabe et occidentale. Ce « maître enchanteur » qui crée « une musique à la fois totalement ancrée dans une culture ancestrale hautement sophistiquée et éminemment contemporaine dans son ambition universaliste » a joué et enregistré avec de grands noms du jazz contemporain tels que Jan Garbarek, John Surman, Jean-Louis Matinier ou Richard Galliano.
Anouar Brahem s'écoute en sirotant un thé (à la menthe de préférence), en se reposant, en lisant un bon bouquin ou en recevant un bon massage... C'est doux, feutré, sautillant parfois, jamais agressif.
Les musiciens, sur scène, se regardent beaucoup, communiquent avec leurs instruments, comme dans une discussion, le piano accompagne l'oud (dont Brahem se sert comme d'une guitare), et l'accordéon répond à ce même oud dans des solos magnifiques (et très applaudis), où l'instrument se rapproche de l'orgue par les sonorités qui en sortent, comme de longues lamentations. Les passages à l'accordéon de Jean-Louis Matinier ont été les meilleurs moments du spectacle. Mais l'ensemble vaut le détour car le trio fonctionne très bien, dans la connivence et l'excellence musicale.