17 avril 2006

Une belle mort ~ Gil Courtemanche

Éditions Boréal, 2005, 208 pages.
L'auteur (enfin une biographie complète ! Je l'ai trouvée sur le site des Éditions Boréal)

Gil Courtemanche est journaliste depuis 1962.

Jusqu’en 1977, il a collaboré à différentes émissions radio et télé de Radio-Canada telles que Le 60, Métro Magazine et Présent national.
De 1978 à 1980, pour Radio-Canada toujours, il a conçu et animé l’émission L’Événement et a aussi été animateur et scripteur de l’émission Enjeux, tout en étant éditorialiste à la station CBOT à Ottawa (réseau anglais). En 1978, il a animé et scénarisé le premier magazine d’affaires publiques de Télé-Québec, Contact.
De 1980 à 1986, Gil Courtemanche a été animateur, analyste et correspondant pour les émissions Télémag, Première Page, Le Point, à Radio-Canada.

Il a aussi été journaliste pour La Presse et a participé à la conception et à la fondation du quotidien Le Jour.
Depuis 1986 et encore à ce jour, il collabore à diverses publications, notamment Alternatives et Le Libraire, en plus de tenir une chronique dans le quotidien Le Devoir.

Il a par ailleurs tenu une chronique hebdomadaire sur la politique internationale dans les quotidiens Le Soleil et Le Droit, durant 8 ans. Plusieurs de ses textes sont regroupés dans Chroniques internationales, paru en 1991 au Boréal.

Il a coréalisé la série de témoignages Soleil dans la nuit, trente clips produits pour TV5 Europe-Afrique-Canada, à l’occasion du premier anniversaire du génocide au Rwanda. Il a réalisé et scénarisé L’Église du sida (The Gospel of AIDS), documentaire sur le sida au Rwanda (prix du meilleur documentaire du Festival Vues d’Afrique 1993) qui lui fournira la matière de son roman, Un dimanche à la piscine à Kigali, acclamé aussitôt par le public puis par la critique, et aujourd’hui traduit dans 10 langues et 13 pays. Gil Courtemanche a également produit et réalisé divers documentaires et messages publicitaires sur le tiers monde pour les organismes «Le Cardinal Léger et ses œuvres» et OXFAM-Québec (la lèpre en Haïti, la problématique de l’eau, le développement agricole aux Philippines, le programme de formation d’enfants handicapés en Thaïlande, etc.)
Coréalisateur et scénariste pour Radio-Canada et TF1 du docu-variétés Roch Voisine l’Idole (prix Félix et Gémeaux de la meilleure émission de variétés 1991), il a aussi réalisé et scénarisé Kashtin: Le Tambour éternel (Kashtin: The Eternal Drum).

Commentateur pour diverses émissions d’affaires publiques, animateur durant un an de la série The Editors sur PBS, collaborateur régulier au magazine L’actualité (il y a signé divers grands reportages, dont un numéro spécial sur l’Algérie, en 1998), Gil Courtemanche a remporté en 1998 le National Magazine Award for Political Reporting.



Une belle mort (résumé de la quatrième de couverture)
«Noël. Le repas du réveillon. Toute la famille est réunie autour du père et de la mère. Hier encore figure imposante qui terrorisait ses enfants, le père, victime du parkinson rigide, est aujourd’hui prisonnier de son corps. Les paroles qui résonnent dans sa tête n’arrivent plus à franchir ses lèvres. Les mouvements qu’il veut faire le trahissent. André, l’aîné de la famille, approche la soixantaine. Il n’a jamais aimé son père, celui-ci ayant trop abusé de son pouvoir, trop menti, trop manipulé ses proches pour sauvegarder son image de toute puissance. Pourtant, il ne peut s’empêcher d’être profondément touché en étant le témoin de la déchéance de cet homme. Que faire quand on est en présence de quelqu’un à qui désormais tous les plaisirs sont interdits ? Faut-il prolonger sa vie, ou plutôt l’aider à l’abréger ? Autour de la table, les avis sont partagés. Gil Courtemanche nous fait vivre encore une fois une expérience humaine bouleversante. En mettant merveilleusement en scène ce drame qui interpelle chacun de nous, il pose de façon nouvelle mais tout aussi magistrale la question qui était au coeur de son premier roman : Pourquoi vivre ? Pourquoi mourir ?»
Gil Courtemanche, ou du moins son personnage, règle dans ce roman ses comptes avec son père.
Ce dernier, âgé et malade, reste le "chef" autoritaire d'une famille de dix enfants et de beaucoup de petits enfants. Le narrateur, aîné de ces dix enfants, n'a jamais aimé son père, lui reprochant cette autorité, cette violence sournoise contre ses enfants et aussi contre sa femme.
«Ce père, selon l'auteur, incarne toute une génération de pères autoritaires, servis par des épouses qui s'abîmaient dans le devoir. Des couples que la vague de Mai 68 et ses variantes ont fait disparaître pour laisser place à des paternités plus souples et moins assoiffées de pouvoir. » (Caroline Montpetit, Le Devoir, 17 septembre 2005)
Il se remémore par exemple ce doré, que son père lui a volé lors d'un concours de pêche, ces humiliations mal vécues, qui ressortent à travers la lente agonie du père.
Le père, à cause de sa maladie, devient l'enfant de ses propres enfants, ne pouvant ni se déplacer, ni manger, ni parler sans aide extérieure, qu'il refuse par ailleurs.
Un dilemme : doit-on laisser son père souffrir, ravagé par la maladie, jusqu'à une mort certaine et difficile ; ou bien l'aider à "bien mourir", en lui offrant le meilleur, tout ce qu'il aime : de la nourriture grasse et riche, du bon vin, des émotions, jusqu'à une mort certaine elle aussi mais presque agréable ?
Ce sont les questions que l'auteur nous pose tout au long de ce livre, assez dur à encaisser tant son propos est cru. Les relations familiales occupent aussi une place de choix dans ce livre, et l'auteur n'est pas tendre. En fait, il dit ce que beaucoup de personnes ne veulent pas entendre. En effet, dans cette famille très nombreuse, il n'hésite pas à dire qu'il n'aime pas son père et que tel frère ou telle soeur est un/une imbécile. D'ailleurs, il n'y a pas de tendresse ni de liens réels entre ces frères et soeurs. Seul le neveu, William, «dit Sam», un adolescent très en avance sur son âge, réussit à ouvrir le coeur du narrateur et à le toucher. Il symbolise une vision différente, celle de la jeune génération et du renouveau, de la vie finalement.
Ses frères et soeurs sont affublés par le narrateur du qualificatif découlant du métier de chacun : ainsi nous avons l'homéopathe, le géographe, la tragédienne, la banquière, etc.
Tous ne sont pas d'accord avec la vision du narrateur, ainsi cela permet de partager le clan en deux groupes : d'un côté les bouddhistes, partisans d'une belle mort et préoccupés par la qualité immédiate de la vie, et de l'autre côté les médicaux, qui souhaitent suivre les recommandations des médecins et «voudraient faire éviter tout excès de table à ce père de 86 ans dont la nourriture reste l'unique plaisir» (Éric Paquin, Journal Voir, 22 septembre 2005).
À partir de ce constat, les deux clans vont s'affronter tout en essayant de se comprendre. La mère, au milieu de tout ça, essaye de sauver les meubles, avant de flancher à son tour.
Se déroulant en grande partie autour d'une tablée de Noël, Une belle mort est propice à de belles réflexions entre les différents personnages, sur la vie, sur la mort, sur la filiation. Isabelle, la jeune future épouse du narrateur, pense que cette famille est «la seule famille totalement dysfonctionnelle qui réussisse à fonctionner, et surtout à durer, même si c'est dans une harmonie chaotique» (p. 188)
Ce n'est pas peu dire...
J'ai beaucoup aimé ce livre. Le style est très journalistique et très précis, une précision de scalpel, cela va droit au but. Le personnage principal (comme dans Un dimanche à la piscine à Kigali) peut être haïssable par moments, mais est-ce parce qu'il est animé de sentiments négatifs envers son père, ce qui est plutôt contraire au politically correct ? Sûrement. Finalement il est haïssable et touchant à la fois, on le découvre au fur et à mesure, il chemine, il est humain tout simplement. Bien sûr, ce livre est dur à lire parfois, parce qu'il nous ramène à notre propre mort, et surtout à la façon dont nous allons mourir. Il y a beaucoup d'émotions qui nous viennent à la lecture de ce livre...

Une belle mort sera adapté au cinéma

«Lyse Lafontaine et Michael Mosca d’Équinoxe Productions ont fait l’acquisition des droits en vue de l’adaptation cinématographique du dernier roman de Gil Courtemanche, Une belle mort, qui vient de paraître aux Éditions Boréal.
Le long métrage sera coscénarisé par l’auteur et Léa Pool qui en assumera aussi la réalisation.

Avec cette histoire, Gil Courtemanche nous entraîne dans une nouvelle expérience au cœur de l’humain, et il le fait dans un style où il mêle avec brio une écriture intensément triste, un peu cynique, et complètement jubilatoire.
Pour Lyse Lafontaine et Michael Mosca, il s’agit d’une deuxième expérience de travail avec Gil Courtemanche dont le précédent roman a aussi été adapté au cinéma. Réalisé par Robert Favreau et mettant en vedette Luc Picard et Fatou N’Diaye, Un dimanche à Kigali prendra l’affiche au printemps 2006.»
(source : www.lecinema.ca)
En écrivant ceci, j'écoute cela : Marie-Jo Thério ~ Les matins habitables (2005) (encore !)

5 commentaires:

Anonyme a dit...

Curieusement (mais, le hasard existe-t-il ?), c'est la deuxième critique que je lis en deux jours à propos de ce livre. mais bon, avec la sortie d'"Un dimanche à Kigali", ce n'est peut-être pas surprenant.
Sauf qu'hier c'était le quatrième anniversaire du départ de mon père, alors bien sûr que ça m'interpelle particulièrement.

ma question : Toi, Fibula, tu en as pensé quoi de ce livre exactement ?

Je t'embrasse,

Lætitia Le Clech a dit...

J'ai beaucoup aimé ce livre. Le style est très journalistique et très précis, une précision de scalpel, cela va droit au but. Le personnage principal (comme dans Un dimanche à la piscine à Kigali) peut être haïssable par moments, mais est-ce parce qu'il est animé de sentiments négatifs envers son père, ce qui est plutôt contraire au "politically correct"? Sûrement.
Finalement il est haïssable et touchant à la fois, on le découvre au fur et à mesure, il chemine, il est humain tout simplement.
Bien sûr, ce livre est dur à lire parfois, parce qu'il nous ramène à notre propre mort, et surtout à la façon dont nous allons mourir. Il y a beaucoup d'émotions qui nous viennent à la lecture de ce livre...

Finalement, j'aurais dû écrire ça dans le texte sur le livre et non dans les commentaires :) !
Merci pour ta question !

Anonyme a dit...

Merci :-)

C'était la partie qui manquait (pour moi en tout cas)

Bises !

Anonyme a dit...

Coucou fibula, un petit message pour te remercier du tien et te dire que j'ai pu arriver au deuxième niveau du jeu : ouf ! !!Si tu veux je te dis comment faire en off. Et bravo pour la qualité de ton blog ;)

Bavardage sens dessus dessous sur la culture et la communication, la communication de la culture et la culture de la communication a dit...

Bonjour!

Je découvre ton blog avec beaucoup d'intérêt, et je me permets de faire un lien à ton article sur "Une belle mort" dans mon blog...
J'ai beaucoup aimé ce livre, très touchant et aussi, je trouve, très drôle... c'est un peu le sens de la tragédie humaine: mieux vaut ne pas la prendre au sérieux!

A bientôt!