24 août 2009

Des vents contraires

Des vents contraires, Olivier Adam, 2009

Encore un formidable roman d'Olivier Adam, à l'écriture lumineuse et au propos bouleversant. Des personnages, incluant les paysages (qui sont des personnages à part entière dans les romans d'Olivier Adam), cassés par la vie, comme ces falaises abruptes et dangereuses, ou cette mer agitée et fourbe, mais qui se battent toujours pour faire briller une petite étincelle de vie ou un sourire d'enfant. Des personnages attachants, à qui l'on tend la main durant toute la lecture de ce livre, lecture rapide puisqu'il est difficile de les laisser ne serait-ce que pour dormir...
Je me souviens de Falaises, que j'avais lu en une nuit, ne pouvant pas lâcher ce texte bouleversant. Cela aurait pu être la même chose pour celui-là, même si tant de tristesse et de mélancolie pèse parfois.

10 août 2009

Dans le ventre de Montréal

Montréal souterrain, sous le béton, le mythe, Fabien Déglise, Éditions Héliotrope, 2008

Les ambiguïtés urbaines me fascinent parfois, particulièrement à Montréal, où, ne nous le cachons pas, elles sont nombreuses.
Il en va ainsi de la fameuse ville souterraine, que j'ai eu l'occasion d'arpenter il y a quelques années.
Fabien Déglise, sociologue de formation et aujourd'hui journaliste au Devoir depuis 2001, s'est penché sur l'histoire de la création de cette ville sous la ville. En sept chapitres distincts (Rêver, creuser, inaugurer, consommer, aseptiser, voyager, inspirer), l'auteur nous amène du rêve d'une ville intérieure à sa réalisation concrète, tunnel après tunnel, galerie après galerie, et à ses différents usages. Une construction fortement liée à l'Histoire du Québec, de la Grande Noirceur au référendum de 1980...
L'œil objectif de Fabien Déglise nous montre les contradictions qui existent dans cet ensemble, comme ces espaces parfois inutiles, ou ces indications souvent difficiles à trouver ! Il n'est pas rare de se perdre dans les couloirs successifs du Montréal souterrain.

J'ai toujours été surprise par l'image de Montréal à l'étranger. Mes amis français m'ont souvent dit : « Vous avez une ville souterraine, vous ! On ira se promener dans la ville souterraine ?»
Je n'y avais jamais mis les pieds jusqu'à il y a deux ans car pour moi, elle n'était synonyme que de magasins et de consommation de masse.
La lecture de ce livre est une visite à part entière, mais très loin des guides touristiques, qui, si ce n'est déjà fait, vous donnera envie d'aller explorer ces galeries, en connaissant les petits secrets de leur construction, de la politique de la Ville à leur égard et de tous les ouvrages artistiques que l'on peut y trouver (plus de 120 créations sont visibles dans ces galeries, métros inclus). L'auteur nous précise que «certains disent que cela fait du sous-sol de la métropole le 31ème musée de Montréal».
Savez-vous où se trouve cette murale de Frédéric Back, qui retrace l'histoire de la musique à Montréal ?
Qui sait qu'il y a une oeuvre d'art de Guido Molinari à l'entrée souterraine du magasin Simons ?
Peu de gens... car malheureusement, si ces oeuvres sont bel et bien présentes dans la ville souterraine, elles ne sont que peu mises en valeur.
Vous apprendrez tout cela et bien d'autres choses dans ce livre, pour toutes les personnes qui aiment à mieux connaître leur lieu de vie.

Un article dans La Presse.

Un super site passionné sur le métro de Montréal.

01 août 2009

La pluie, avant qu'elle tombe

La pluie, avant qu'elle tombe, Jonathan Coe, Éditions Gallimard, 2009

Jonathan Coe est l'un de mes auteurs contemporains préférés. J'adore ses histoires où se mêlent politique et musique, histoires personnelles et Histoire avec un grand H, souvent avec beaucoup d'humour. Dans ce dernier roman, au si beau titre (et le passage duquel il est tiré est très beau aussi), pas question de politique, ni de musique, excepté ce bailero, musique auvergnate découverte par la narratrice avec son premier et seul véritable amour, et qui ne la quittera jamais. Ce dernier ouvrage ne ressemble pas beaucoup à ses prédécesseurs, si ce n'est par le style et la construction du texte, toujours aussi habilement mené et avec une verve exaltante. Ici, il est question d'histoires personnelles et familiales. Plus exactement de filiation, d'héritage. Une histoire où les femmes ont une place prépondérante. Jonathan Coe est un auteur si sensible qu'il arrive à se mettre dans la peau d'une vieille dame, Rosamond, qui va raconter, au moyen de cassettes qu'elle lègue à une mystérieuse Imogen, l'histoire bouleversante de sa famille sur trois générations. Comment le désamour d'une femme peut entraîner chez sa propre fille et sa petite fille ensuite tant de haine et de violence, envers elles-mêmes, envers les autres ? Comment pardonner ?
Un roman bouleversant, comme chacun des romans de Jonathan Coe, mais celui-là plus ancré dans le réel, plus abouti dans les émotions qu'il suscite.

La critique de Benzine Magazine

Exit Wounds

Exit Wounds de Rutu Modan, traduit de l'hébreu par Rosie Pinhas-Delpuech, Actes Sud BD, 2007

Le point de départ de cette BD : un chauffeur de taxi, Kobi, rencontre la mystérieuse Nomi, surnommée "La girafe" (tiens, ça me rappelle des souvenirs...), qui lui parle de son père qui aurait peut-être disparu dans un attentat quelques jours auparavant.
Comment a-t-elle connu le père de Kobi ? Que s'est-il passé le jour de l'attentat ? C'est ce qu'ils tenteront de découvrir en allant à la rencontre des différents protagonistes autour de cet événement, mais également à la rencontre d'eux-mêmes...
Une histoire intéressante et bien écrite, que l'on lit d'une traite et en très peu de temps en ce qui me concerne. Je n'ai pas beaucoup accroché sur le dessin mais c'est tout de même à découvrir.
Cette bande dessinée a reçu deux prix : Le prix France Info 2008 de la bande dessinée d'actualité et de reportage et le Prix Essentiel 2008 à Angoulême.
Exit Wounds est assimilé à une bande dessinée"ligne claire" qui est un terme désignant un dessin sobre et peu exubérant. La bande dessinée en ligne claire vient d'Hergé, dessinateur de Tintin, et le terme a été créé en 1977. Voici ce qu'en dit Wikipédia.

Voici un article très intéressant qui comprend un entretien avec l'auteure d'Exit Wounds : Actualités de la bande dessinée ligne claire


Harvey

Harvey, de Hervé Bouchard et Janice Nadeau, Éditions La Pastèque, 2009

Les Éditions La Pastèque ont pour habitude de nous offrir des ouvrages originaux et touchants (comme la série des Paul, de Michel Rabagliatti, l'ouvrage L'Appareil, etc.). Souvent, on a même droit à de petits bijoux. C'est encore une fois le cas avec cet ouvrage de Hervé Bouchard et Janice Nadeau, qui nous parle du deuil et de la façon d'aborder la mort d'un parent pour un enfant. C'est poignant et très beau.

Une critique du journal Voir, par Tristan Malavoy-Racine :
« Un roman graphique signé Janice Nadeau et Hervé Bouchard? L'annonce n'était pas passée inaperçue, en début d'année. Après quelques mois d'attente et de supputations - «mais à quoi donc est-ce que ça va ressembler?» a-t-on entendu souvent dans le milieu -, voici la chose, fruit du travail à quatre mains de la gagnante de deux Prix du Gouverneur général (littérature jeunesse - illustration) et de celui du Grand Prix du livre de Montréal 2006 pour son inclassable roman Parents et amis sont invités à y assister (Le Quartanier). Gros plan sur le petit Harvey, pour qui le printemps est à jamais synonyme de perte. C'est à cette saison en effet que son monde a basculé, quand en rentrant à la maison, un soir, après avoir joué dans les rigoles avec ses amis et son frère Cantin, il a vu son père sortir les pieds devant, son corps inerte emporté par deux brancardiers. Récit tout simple d'une mort et de son impact sur l'imaginaire d'un enfant, Harvey comporte aussi des éléments de fantastique intégrés avec beaucoup de finesse, auxquels contribue le dessin aux dominantes de beige et de prune, tantôt collé au réel, tantôt capable de dire l'émotion pure. Une histoire belle à pleurer, dont La Pastèque a fait un objet d'exception (impression en trichromie, couverture cartonnée toilée.). »

Le super article de La Presse ici.