Anita Conti, cette femme incroyable, née à la fin du XIXe siècle et décédée en 1997, première femme océanographe, a traversé le siècle des deux grandes guerres mondiales et de la prise de conscience environnementale. Que dirait-elle si elle vivait encore aujourd'hui ? Elle a côtoyé de grands explorateurs tels que Jacques-Yves Cousteau (et sa femme, si peu souvent mise de l'avant dans les ouvrages consacrés au biologiste), Théodore Monod et d'autres personnalités du monde des arts et de la sciences (Marie Curie, par exemple).
Ultra documentée, Anita Conti est agrémentée de biographies à la fin de l'ouvrage, très complètes, de tous les protagonistes que nous croisons dans le livre.
Les auteurs Catel et Bocquet nous permettent de découvrir une femme très active, tour à tour artiste de la reliure, journaliste, biologiste, photographe, exploratrice. Elle abordera très tôt les sujets environnementaux, peu populaires à l'époque, à l'instar d'une Rachel Carson, aux États-Unis, qui a alerté en 1962, dans son ouvrage Printemps silencieux, contre les pesticides.
Anita Conti lancera l'alerte, elle, à propos des dangers de la surpêche. Ses travaux ont permis de mieux comprendre la biodiversité marine. Elle a également toujours eu une conscience sociale dans tout ce qu'elle entreprenait. Par exemple, le problème de la surpêche, au-delà des conséquences écologiques graves, illustrait pour elle les inégalités sociales : ceux qui pêchaient trop (et rejetaient les "mauvais poissons" à la mer) et ceux qui n'avaient pas assez à manger et souffraient de malnutrition.
Dans leur ouvrage, la vie d'Anita Conti est représentée de façon très réaliste, avec de nombreux détails documentaires. Les dessins en noir et blanc sont très clairs et lisibles. Les éléments choisis de sa vie permettent de voir l'évolution de cette femme, qui s'est imposée dans un monde d'hommes. C'était par exemple totalement nouveau qu'une femme embarque sur un bateau de pêche. L'ouvrage est épais et peut faire peur, mais il se lit très rapidement, tellement c'est passionnant.
Cette biographie fait partie d'une collection éditée chez Casterman, Les clandestines de l'histoire, racontant la vie d'illustres femmes peu valorisées dans les manuels et autres ouvrages officiels. On y retrouve les biographies de Joséphine Baker ou Kiki de Montparnasse, par exemple. Concernant Anita Conti, José-Louis Bocquet (scénariste) l'a rencontrée par hasard alors qu'elle avait 93 ans, quelques années avant sa mort. Par ailleurs, les deux auteurs, un couple dans la vie, habitent à quelques maisons de là où Anita Conti a vécu quelques temps.
Anita Conti, Catel et Bocquet, Casterman édition, 2024, 368 pages.
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