(photo empruntée au site Internet du FIL) |
Présenté à l’occasion des 10 ans de la Grande Bibliothèque
du Québec, le spectacle littéraire Le
paradis n’est-il pas une bibliothèque ? porte
un titre qui fait référence à Borges (La
bibliothèque de Babel, 1941) et à Bachelard (La poétique de la rêverie, 1960). Il a eu lieu le vendredi 25
septembre dernier dans le cadre de la 21e édition du Festival
international de la littérature (FIL). Ce festival, créé en 1994 par l’UNEQ
(Union des écrivaines et des écrivains québécois), célèbre les mots par des
spectacles littéraires, des conférences et des animations littéraires
originales et créatives.
« Une bibliothèque que l’on monte est une vie
» (Dominguez, 2004)
Le but du spectacle littéraire Le paradis n’est-il pas une bibliothèque ? était de présenter des
extraits de livres qui parlent de bibliothèques, en les révélant dans une
lecture collective et passionnée. Les comédiens et comédiennes Marc Béland,
Renaud Lacelle-Bourdon, Marie-Ève Pelletier, Dominique Quesnel et Simon Lacroix
se sont prêtés au jeu du partage littéraire avec une grande ferveur.
La mise en scène épurée (brouillonne par moments),
agrémentée de projections d’extraits de films (trop courts et non référencés), forçait
le spectateur à se concentrer sur les mots livrés par les comédiens. Ceux-ci
ont commencé le spectacle par un extrait jubilatoire et particulièrement bien
senti d’Un ange cornu avec des ailes de
tôle, de Michel Tremblay (1996). Chaque spectateur a ressenti l’émotion de
sa première visite dans une bibliothèque grâce aux mots du grand auteur et
dramaturge québécois…
« Les livres sont
notre immortalité » (Chalamov, 2003)
Les lectures, tour à tour théoriques avec Georges Perec, philosophiques
avec Carlos Maria Dominguez, poétiques avec Victor Hugo ou politiques avec Ray
Bradbury et Alberto Manguel, nous ont fait découvrir ou redécouvrir l’amour
incommensurable de ces écrivains pour les mots et les livres. Mais aussi la
réflexion qu’ils ont menée toute leur vie sur la portée que les mots peuvent
avoir dans notre vie. Ce qui aurait pu devenir lassant s’est révélé une
brillante mise en exergue de la présence et de l’importance des livres dans la
vie de tout lecteur, jusqu’à en devenir parfois fou, comme dans le livre de Carlos
Maria Dominguez, La maison en papier.
L’auteur y présente les livres comme dangereux pour qui les aime trop…
« La censure
des livres est commune à tous les peuples de tous les temps » (Manguel, 2006)
Abordant également le thème de la censure, le
spectacle nous a présenté ceux qui ne les aiment pas, les livres, avec un
extrait d’archives de l’autodafé de livres sur l’Opernplatz de Berlin, en 1933 (plus
de 20 000 livres considérés comme « hérétiques » furent brûlés par
les nazis), suivi d’un extrait de Fahrenheit 451, de Ray Bradbury, joué
par nos comédiens.
Ne jamais oublier que la liberté reste fragile… et ici en particulier celle que nous procurent les livres.
L’Histoire n’a pas ménagé les livres, et Victor Hugo s’en est offusqué dans son poème À qui la faute ?, tiré du recueil consacré à l’année 1870, L’année terrible. En effet, l’incendie du palais du Louvre, le 24 mai 1871, par les communards a détruit une grande partie des livres de la bibliothèque du Louvre.
Ne jamais oublier que la liberté reste fragile… et ici en particulier celle que nous procurent les livres.
L’Histoire n’a pas ménagé les livres, et Victor Hugo s’en est offusqué dans son poème À qui la faute ?, tiré du recueil consacré à l’année 1870, L’année terrible. En effet, l’incendie du palais du Louvre, le 24 mai 1871, par les communards a détruit une grande partie des livres de la bibliothèque du Louvre.
« As-tu donc oublié
que ton libérateur
C’est le livre ? Le livre est là sur la hauteur ;
Il luit ; parce qu'il brille et qu'il les illumine,
Il détruit l'échafaud, la guerre, la famine
Il parle, plus d'esclave et plus de paria. »
C’est le livre ? Le livre est là sur la hauteur ;
Il luit ; parce qu'il brille et qu'il les illumine,
Il détruit l'échafaud, la guerre, la famine
Il parle, plus d'esclave et plus de paria. »
Quelques pauses cabotines (pas toujours
nécessaires) nous ont permis de souffler quelques minutes en écoutant
l’énumération des bibliothécaires célèbres (Jorge Luis Borges,
Georges Bataille, Roland Barthes, Goethe, André Breton, peu de femmes ici…). Le
combat littéraire que se sont livré Renaud Lacelle-Bourdon et Marie-Ève
Pelletier, sur le mode « je choisis un livre au hasard dans le chariot, je lis
les premiers mots et tu devines de quel livre il s’agit », se voulait drôle
mais tombait quelque peu à plat. Le cabotinage a des limites…
Car ce qui comptait vraiment, dans ce spectacle, était de «
prêter l’oreille aux livres silencieux [pour que] les voix du monde
[nous] parviennent » (Jean-Frédéric Messier).
De ce point de vue-là, il s’agissait d’une soirée réussie.
De ce point de vue-là, il s’agissait d’une soirée réussie.
Lætitia Le Clech
Livres évoqués dans
ce texte :
Bachelard, G. (1960). La poétique de la rêverie.
Paris: PUF.
Borges, J. L. (1951). La bibliothèque de Babel. Dans Fictions. Paris : Gallimard.
Bradbury,
R. (1955). Fahrenheit 451. Paris: Denoël.
Chalamov, V. (2003). Mes bibliothèques. Paris:
Interférence.
Dominguez, C. M. (2004). La maison en papier. Paris:
Seuil.
Hugo, V. (1872). À qui la faute ? In L’année terrible.
Consulté à l’adresse http://poesie.webnet.fr/lesgrandsclassiques/poemes/victor_hugo/a_qui_la_faute.html
Manguel, A. (2006). La bibliothèque, la nuit. Paris:
Actes Sud/Leméac.
Perec, G. (2003). Penser/Classer. Paris: Seuil.
Tremblay, M. (1996). Un ange cornu avec des ailes de tôle.
Paris/Montréal: Actes Sud/Leméac.
Vous trouverez d’autres suggestions de livres qui portent
sur les bibliothèques à la page de l’événement, sur le site du FIL.
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