18 février 2012

Habibi

Habibi, Craig Thompson, Éditions Casterman (pour la version en français), collection Écritures, 2011

L'édition française (Casterman)
Cinq ans que nous attendions le nouvel ouvrage de l'auteur de bandes dessinées américain Craig Thompson. Cinq ans à suivre son blogue Doot Doot Garden pour savoir l'état d'avancement de son travail.
Habibi est enfin là, entre nos mains, énorme œuvre de presque 700 pages, agrémentée de notes et de traductions de deux poèmes.
Et là, on comprend la somme de travail, de recherches effectuées par l'auteur, dans le but de nous offrir ce résultat somptueux.
Presque dix ans après la bande dessinée initiatique Blankets, qui a été mon initiation aux romans graphiques, Craig Thompson, qui est demeuré depuis tout ce temps ma référence en la matière, nous amène complètement ailleurs. Si on se demande ce qui l'a poussé à se pencher sur cette histoire d'amour singulière, on ne peut qu'admirer l'acharnement et la passion qui l'ont animé pour mener cette histoire jusqu'à sa conclusion.

L'édition américaine (Pantheon)
Habibi, c'est quasiment l'histoire de l'humanité, à travers l'amour que se vouent Cham / Zam (Habibi) et Dodola, dans un décor à la fois futuriste et antique. L'auteur traite dans son livre de notre rapport à la nature, à l'autre, tout cela en illustrant son histoire par des paraboles tirées du Coran et de la Bible. Si le fond s'en va parfois vers une fable apocalyptique qui n'évite pas certains écueils et raccourcis (notamment par la vision simpliste de la pollution par l'homme, et une appréhension plutôt personnelle de la sexualité), la forme nous subjugue littéralement.
Le dessin est d'une telle précision, quasiment hypnotisante, trait fin noir et blanc, détails arabisants pour illustrer les différents chapitres.
Un travail impressionnant et érudit qui fait de Craig Thompson un auteur tout à fait singulier et remarquable dans le monde de la bande dessinée.
Pour ceux qui pensent encore que la BD se résume aux supers héros et aux comics américains, Habibi est un bon moyen de découvrir un récit très riche et imaginatif, à la narration aussi complexe que celle d'un roman.
Si vous savez lire l'anglais, l'édition américaine vaut vraiment le détour. Dommage que Casterman n'ait pas reproduit l'enveloppe originale.

Libé en parle (Éric Loret)
Et Télérama aussi (Jean-Claude Loiseau)

[Lætitia Le Clech]

Humeur musicale : John Coltrane, Best Of (Blue Note)

6 commentaires:

elsoute a dit...

Très bon résumé de ce que l'on ressent en lisant cette oeuvre! Quel travail! Je n'ai lu Blankets qu'après et je dois dire le côté très intimiste et personnel m'a bcp moins touché... Habibi est épique, flamboyant et la narration est, en effet, complexe et assez subltile. Enfin j'ai aimé quoi :)
bisettes

Lætitia Le Clech a dit...

Merci Elsoute pour ton commentaire!
Blankets et Habibi sont très différents en effet dans le fond. On y retrouve cependant une même volonté d'ouverture à l'autre.
J'ai aimé le côté personnel de Blankets par contre, mais ça c'est parce que j'ai toujours aimé les romans initiatiques.
Flamboyant et épique, en effet, ce sont des qualificatifs que l'on pourrait ajouter à mon billet sur Habibi!

Caroline Pierret a dit...

Lecture pas facile, je me suis demandé si la présence du sex est si nécessaire. Cela m' à énervé à un moment donné. Je sentais une certaine complaisance. Pour le reste , une excellente bd quand même. Belle critique de ta part.

Lætitia Le Clech a dit...

@ Caro : Tu l'as déjà finie!!! Il te restait encore un peu de temps quand même... ;-)
Merci pour ton commentaire!

Lætitia Le Clech a dit...

C'est sûr que l'aspect sexuel fait partie de l'histoire quand même, mais il est souvent vu comme quelque chose de sale et négatif. Et au seul moment où cela peut être positif, ce n'est plus possible...:S

MJ a dit...

Pour nouvelle donne, point d'inquiétude, il paraît qu'on le trouve à chaque coin de rue en Croatie...plus sérieusement, son nouveau film sort (en France) mercredi et semble visiblement déjà mettre les critiques à genoux...donc ça va peut-être éveiller de l'intérêt pour son précédent, qui, sans vouloir retourner le couteau dans la plaie, reste le meilleur film que j'ai vu en 2011 hors cinéma...
sinon il doit être trouvable je pense chez des vendeurs du net sans trop de problème...
dis donc ça déclenche les passions Habibi, tu devrais devenir attachée de presse de Craig Thompson !