Petite maison d'édition basée à Chicoutimi, La Peuplade offre des ouvrages fort jolis, et des textes originaux venus de jeunes auteurs québécois. Notons la publication dernièrement du dernier roman de Bertrand Laverdure, Bureau universel des copyrights, qui n'en est pas à ses premières armes.
Marisol Drouin, originaire de la région de Charlevoix, signe quant à elle avec Quai 31 son premier roman. Celui-ci nous raconte l'histoire d'Échine et de sa mère, forcés de fuir une île submergée par les eaux et qui sont transportés, avec leurs semblables, par voie maritime, sur des terres plus accueillantes, ou devrais-je dire plus sèches. Parce que pour l'accueil, on repassera... La saleté côtoie le charcutage d'organes, les séances de masturbation collective, la chasse sauvage aux chats, la maladie, la froideur des sentiments et la ségrégation sociale (Haute-Ville / Basse-Ville). Roman presque d'anticipation, dans un futur peut-être pas si lointain, mais on espère que non, Quai 31 suit son personnage principal, Échine, qui rencontre Pinoche, Chirma, et toutes sortes de personnages trafiqués, transplantés, opérés, et évoluant dans des lieux glauques, au milieu desquels trônent des bocaux remplis d'organes humains.
Pas très joyeux tout cela me direz-vous ? Non, en effet, et c'est par moment encore bien pire. Mais je ne veux pas vous écœurer de ce curieux petit roman.
Il contient au contraire quelques trouvailles magnifiques et un rythme certain, sous une plume plutôt froide mais qui correspond à l'effet recherché. Les personnages sont en effet presque désincarnés dans ce roman, encore plus lorsque survient une étrange maladie appelée le tordu, malformation de la colonne vertébrale qui se répand comme une trainée de poudre et qui fait que ceux qui en sont atteints se recroquevillent sur eux-mêmes dans d'atroces douleurs jusqu'à en mourir. Notre ami Échine en est exempt grâce à une opération qu'il a "gagnée" avant d'être transporté dans son nouveau lieu de vie. Ce qui fait de lui, et de tous les autres "sans-terres", un suspect idéal à éliminer.
Le rythme de la narration est soutenu et les dialogues aiguisés, ce qu'imagine l'auteure a certaines résonances dans notre présent. Ce qui en fait un livre intéressant à lire et prometteur pour la suite. Même si l'avenir, sous la plume de Marisol Drouin, paraît bien incertain...
Ma Mère en a parlé sur son site (Merci à elle pour le cadeau!)
Le blogue de l'auteure
La critique de Josée Lapointe, dans La Presse
[Lætitia Le Clech]
Humeur musicale : Keith Jarrett, The Köln Concert (ECM Records, 1975)
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