«Pas du tout, répond la principale intéressée. Je me révèle beaucoup plus dans mes disques. Mes chansons sont toutes autobiographiques. Pour moi, la musique et la littérature, ce sont deux types d’écriture complètement différents. La première est connectée à mon cœur, à mes émotions, tandis que la deuxième est reliée à mon imagination. Je me suis mise dans la peau d’une autre personne. Je pouvais lui faire vivre ce que je voulais.»
Ce qui n'empêche pas d'avoir de la difficulté à "oublier" Mara derrière le personnage de Florence.
Florence, début quarantaine, mère de deux enfants qu'elle chérit plus que tout, est aux prises avec le deuil (sa mère vient de mourir), la maladie (elle est bipolaire), la rupture amoureuse (elle est séparée du père de ses enfants et a de la difficulté à se stabiliser auprès d'un homme). Elle se cherche, beaucoup, et la plume de Mara Tremblay décortique ses gestes et pensées quotidiennes, et nous fait vivre les montagnes russes que Florence traverse. Cela comporte ses qualités et ses défauts. Qualités pour le fond : l'évocation de la réalité d'une personne bipolaire, des agressions sexuelles que l'on tait bien trop souvent, et des troubles sexuels et affectifs découlant de ces drames.
Défauts pour la forme : le côté décousu et narcissique de l'exercice, la multiplication excessive du pronom personnel je, plaqué là pour nous relater le quotidien et les émotions souvent redondants de Florence. Malheureusement, ces défauts de style empêchent l'attachement au personnage, qui au lieu de nous attendrir, semble nous étouffer en même temps qu'il s’essouffle lui-même.
Ce récit s'apparente à un journal, comme le dit Nathalie Petrowski (voir le lien sur l'article ci-bas), au « journal d'une bipolaire ». Thérapie probablement bénéfique pour son auteure qui, en évoquant la mort de la mère de Florence et en l'opposant à la naissance de son deuxième enfant, tente de provoquer son propre travail de deuil, qu'elle avoue avoir du mal à faire. Si le titre nous laisse imaginer une œuvre poétique, il s'agit surtout d'un récit cathartique pour Mara Tremblay, et il nous donne l'impression d'avoir été écrit dans l'urgence et peu retravaillé par la suite. Ce qui aurait pu faire la différence entre un projet d'écriture et un objet littéraire.
L'article (entrevue) de Nathalie Petrowski dans La Presse
3 commentaires:
Tu as réussi à bien nuancer tes propos, c'est bien dit, bien écrit, vraiment (avec ce que tu m'avais indiqué)... :)
Oui, si Mara Tremblay manquait de recul pour juger de la pertinence de publier ou non ce récit, son éditeur aurait dû mieux l'accompagner.
Elle ne va pas assez au fond des choses, les événements sont évoqués en trois lignes, les émotions, effleurées...
Tant mieux si elle rejoint des lecteurs, tant mieux si cet exercice lui a fait du bien, mais pour moi, il ne s'agit pas d'un objet littéraire.
Dans le même registre, et en comparaison, «Marie-Hélène au mois de mars» de Maxime-Olivier Moutier est nettement plus maîtrisé.
J’aime bien votre franchise et votre fraicheur. Merci d’avoir pris le temps de lire ce livre pour nous en faire un résumé. Je reviendrai sûrement vous visiter si le temps me le permet
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